Couverts et orfèvrerie : Place à davantage de fantaisie

Avec des ventes plutôt stables ces dernières années à 386,7 millions d’euros HT (hors internet) de chiffre d’affaires en 2021 (source : Observatoire Francéclat/Ecostat), la catégorie des couverts et couteaux de tables est en renouveau. 

Dans le détail, Francéclat annonce en tendance en mars 2023, une progression des ventes des fabricants en France de 12 % pour le segment couverts et couteaux de table sur 2021 comparé à 2019. Concernant les circuits de distribution, l’orfèvrerie, couverts et couteaux ont vu sur la même période leurs ventes augmenter chez les détaillants indépendants (+3%), dans les chaînes et chez les franchisés (+8%), les grandes surfaces (+6%), le hard discount (+38%) ou les discount non alimentaire (+45%), mais baisser dans les grands magasins (-35 %), parce qu’ils ont été longtemps fermés administrativement au printemps 2021. A noter que les magasins de meubles (+4%) pèsent 8 % du chiffre d’affaires, soit 1,5 fois plus que les indépendants et 7 fois plus que le hard discount. 

L’INTERNATIONAL TIRE LES VENTES

« De manière générale, la dynamique est forte notamment à l’export, ce qui est vrai chez Degrenne avec une croissance à deux chiffres à +10%, confie Olivier Perlo-Joncour, responsable marketing produit et innovation de la marque. Soit, pour l’année 2022, une progression de l’ordre de + 30%. Drivé par le CHR, certains de nos marchés clé comme les Etats-Unis sont repartis de plus belle depuis la crise avec l’ouverture d’établissements qui donnent de nouvelles inspirations aux consommateurs. » 

Valorisées par les réseaux sociaux et les magazines, ces nouvelles tables donnent ainsi envie de changer la sienne et de proposer une nouvelle approche de celle-ci. Éléments essentiels à une belle table, les couverts, et dans le cas des plus chics, l’orfèvrerie, proposent aujourd’hui un choix toujours plus large voire original. 

Changer de couverts, c’est changer de décor et égayer sa vaisselle et sa table. Sur ce terrain, Sabre Paris s’est vite imposé comme la marque qui a fait du couvert le nouvel accessoire de table. « Nous sommes un cas à part dans l’univers des arts de la table dans le sens où la marque est jeune (elle fête ses 30 ans en 2023, N.D.L.R.) et que nous ne sommes pas des couteliers, explique Francis Gelb, président de Sabre. Nous sommes avant tout dans l’art de vivre et la décoration, on vient nous chercher pour cela. » Et le concept, qui valorise la couleur (couverts en acier inoxydable 18/10 et manche en résine acrylique de couleur), le dépareillé et la table comme un nouvel espace de jeu, cartonne à l’export. « 90% de notre chiffre d’affaires sont faits en dehors de la France », poursuit-il. Sur le podium de Sabre, l’Amérique du Nord est suivie par la Corée et la Chine. 

L’Asie étant aujourd’hui un marché porteur pour les arts de la table en plus de l’utilisation des baguettes.

UNE OFFRE XXL 

« Clairement le marché devient de plus en plus dynamique et certains consommateurs n’hésitent pas à changer de couverts beaucoup plus souvent qu’avant », confirme Brice Visart, directeur des opérations de la marque Eternum fondée en Belgique depuis 100 ans et qui a amorcé un nouveau développement en s’ouvrant au retail depuis un an. Avec un logo et un catalogue revisités, les couverts se déclinent en sets et en coffrets pour toucher un public plus large avec 3 collections phares pour 3 marchés différents : entrée, milieu et plus haut de gamme. « L’arrivée du PVD (physical vapor deposition), il y a quelques années, a beaucoup fait évoluer le secteur en amenant couleur et fantaisie, poursuit Brice Visart. 

Chez Eternum nous en proposons aux côtés des effets stone washed pour donner à l’inox un côté vintage, du procédé de sablage haute pression qui permet de rendre les gammes moins brillantes et plus mates et nous faisons aussi des gravures laser et proposons différents degrés de polissage. » De quoi hisser Eternum dans le top 6 des fournisseurs de couverts mondiaux. Le dynamisme se ressent sur tous les segments de marchés. 

« Les tendances actuelles n’ont jamais été aussi multiples, assure Benoît Berot, responsable marketing de Jean Dubost. Les couverts satinés et les revêtements PVD (black, doré, cuivré) sont très demandés dans nos gammes de produits. Nous avons également de fortes demandes sur des décors gravés dans l’inox tels que les effets martelés (modèle Flower), textiles (modèle Strasse) ou froissés (fuseau martelé). Enfin, les matières naturelles sont plébiscitées : le bois d’olivier, de hêtre ou chêne ou encore nos couverts en racine de bambou restent de grands intemporels. 

Ces matières naturelles apportent un côté chaleureux et une âme à nos tables. » Côté orfèvrerie, place au même renouveau. « Nous proposons peu de gammes de couverts, mais chaque modèle est un réel élément différenciant sur une table, note Antoine de Rémur, directeur général de la maison Ercuis. Si l’argenterie fait son grand retour dans une volonté de mieux consommer et de transmission, la création a encore toute sa place comme par exemple avec la gamme Miroir, des couteaux personnalisables aux manches en métal argenté et aux lames cuivrées, dorées ou noires. Ou encore avec la gamme Arts décoratifs qui intègre un choix de 30 coloris de laque et des motifs disponibles à la gravure. Nous poussons la personnalisation très loin pour être dans l’exclusivité et dans un niveau de luxe ultime. »

UN PREMIER CAFÉ SABRE EN CORÉE

La marque a inauguré en avril 2023 son premier Café Sabre au sein du grand magasin Hyundai à Séoul. Situé à l’étage de la mode, l’espace de plus de 60 m2 ouvert par l’agent de Sabre en Asie, sert 300 cafés à la journée et propose sur de grandes tables en bois les couverts de la marque dans une ambiance végétalisée. « Pour nous, c’est une présentation atypique de nos collections, explique Francis Gelb, fondateur de Sabre. Disposés comme à l’accoutumée dans des pots en métal, les couverts sont vendus par modèles. Ici, la cuillère à dessert est utilisée pour la table et se vend pour l’usage quotidien. Nous avons imaginé des coloris spécifiquement pour la Corée où les teintes pastels se vendent bien. »

SAVOIR-FAIRE ET ÉCO-RESPONSABILITÉ 

L’argument made in France reste également porteur sur le marché du couvert. Gage de mieux consommer, il assure aux consommateurs qualité et durée dans le temps. Entreprise familiale depuis 3 générations à Thiers, Goyon-Chazeau bénéficie de cet engouement. « Notre chiffre d’affaires a doublé en l’espace de 5 à 6 ans, confie Magali Soucille, PDG de l’entreprise. 

Si nous réalisons 65 % de nos ventes en France, l’international tend à se développer. Pour autant, nous sommes des couteliers et les couverts restent chez nous un achat secondaire, mais on vient à nous pour notre savoir-faire. » Avec deux labels EPV pour la soudure à l’inox et la fabrication des couverts et des couteaux entièrement forgés, Goyon-Chazeau peut se targuer d’être l’un des seuls fabricants à faire des fourchettes entièrement forgées. « Les ménagères 24 ou 48 pièces sont très demandées aux Etats-Unis, notre plus gros marché pour ce type de produits.

L’OUTDOOR INSPIRE LES FABRICANTS

Alors que les couverts en plastique à usage unique sont interdits en Europe depuis le 1er janvier 2020, de nombreux fabricants ont pris le virage d’une consommation plus responsable et proposent des couverts de pique-nique. Ainsi, les fondateurs du groupe Coriolis, Luc Foin et Stéphane Lebeau, ont lancé Akinod, une marque de couverts nomades. « S’agissant d’une nouvelle catégorie sur un nouveau marché et doublé d’un caractère particulièrement innovant, notre produit est en pleine expansion, explique Luc Foin. Les clients qui nous accompagnent depuis le lancement en 2020 constatent des ventes qui ne cessent de progresser. Les salons Maison&Objet et Ambiente de janvier et février 2023 étaient à cet effet des rendez-vous importants qui nous ont permis d’ouvrir plusieurs dizaines de points de vente. En parallèle, nos ventes sont en forte croissance depuis le début de l’année (+20% par rapport à l’année dernière). 

» En parallèle, Goyon-Chazeau a repris il y a 2 ans Douris Chatel, le spécialiste du couteau multilame à Thiers. Résultat, le fabricant sort un modèle dédié au pique-nique et à la balade combinant un couteau et une fourchette vendu dans un étui en cuir. Le lancement est prévu pour l’été 2023. Même chez Degrenne, le nomadisme a la cote avec le modèle Spork. Cette fourchette (acier inoxydable ou argent massif) a les dents biseautées pour permettre de couper les aliments d’une main.

En France, nous en vendons moins mais les clients préfèrent compléter au fur et à mesure. » Idem chez Degrenne qui reste l’un des rares spécialistes de l’art de la table à fabriquer en France dans son usine de Vire en Normandie. « Le made in France reste un étendard reconnu en France mais surtout à l’étranger, assure Olivier Perlo-Joncour, responsable marketing produit et innovation chez Degrenne. La ménagère 24 pièces reste également dans les grosses ventes de notre société. Celle-ci est complétée dans le temps par l’achat d’autres gammes qui permet aux consommateurs de mélanger les couverts. Le mix and match fait partie des tendances du moment. » À souligner, 70% de l’acier utilisé chez Degrenne est d’origine recyclé. Les couverts suivent désormais les tendances et les préoccupations des consommateurs pour mieux briller à table.