Dossier

Café : l'engouement pour les espresso broyeurs ne désespère pas les acteurs de la filtration lente

23 août 2023

Si le dynamisme du segment des machines full automatiques ne faiblit pas, le slow coffee a toujours les faveurs des consommateurs, surfant sur la montée en puissance des cafés de spécialités.

La nouvelle gamme Eletta Explore de De’Longhi est dotée de la technologie Bean Adapt : via l’application Coffee Link, il suffit d’indiquer la typicité du café et le degré de torréfaction : la finesse de mouture, la quantité à moudre et la température offrant la meilleure extraction sont ainsi automatiquement réglées. Nouveauté : la technologie Cold Extraction permet de préparer des cafés cold brew en 4 minutes. Prix public : à partir de 999 €.

La France occupe une place centrale dans l’histoire du café, ayant joué un rôle essentiel dans son commerce et sa diffusion à l’échelle mondiale. De plus, le pays est le foyer de nombreuses innovations méconnues liées aux techniques de traitement et aux machines permettant d’obtenir les arômes les plus raffinés du café. À date, neuf foyers français sur dix seraient équipés d’au moins une machine à café et 37 % en posséderaient plusieurs. Ces chiffres témoignent de l’engouement des consommateurs pour cette boisson. Cependant, les préférences et les habitudes évoluent, et conduisent à des changements significatifs dans l’industrie.

La collection de petit électroménager d’Alessi, Plissé, s’élargit avec une cafetière filtre dessinée par Michele de Lucchi. Outre son design couture désormais caractéristique, l’appareil est doté d’une fonction “démarrage automatique”. 



Si la machine à café filtre était traditionnellement le premier équipement des Français, elle n’équipe désormais que 40 % des foyers français. « C’est conséquent, mais la tendance est à la baisse parce qu’on multiplie les équipements avec le portionné qui équipe 53 % des foyers et les espresso broyeurs dont la montée en puissance est tangible, analyse Émilie Pin qui est responsable statistiques et études au Groupement des marques d’appareils pour la maison (Gifam). Le marché d’espresso broyeur a été multiplié par cinq en 5 ans et les études révèlent que 600 000 machines full automatiques ont été vendues en 2022 (source : GFK market intelligence) sur 5,3 millions de machines à café tous types confondus. C’est très dynamique. »

LA MONTÉE EN PUISSANCE DE L’EXPRESSO BROYEUR 

The Barista Express Impress de Sage combine les fonctions de la Barista Express, best-seller de la marque avec une nouvelle technologie qui permet d’obtenir la dose adaptée d’espresso avec un tassage précise, en réduisant les débordements de la mouture. Prix public : 829,90 €.

Pas moins de cinq raisons expliquent l’engouement pour l’espresso broyeur : « Le premier élément, c’est l’expression d’un besoin d’équipement qualitatif. La tendance existait avant le covid, mais le coup d’accélérateur durant cette période a été réel. Les consommateurs n’hésitent pas à mettre le prix pour avoir un appareil de qualité proche de celui des professionnels », poursuit Émilie Pin. Une analyse partagée par Thomas Spanu, chef de produit chez WMF : « Avec ces machines full automatiques, on retrouve la qualité du bar ou du restaurant. Et c’est clairement ce que recherchent les consommateurs. » À ce désir d’avoir un équipement ménager fiable, efficace et de qualité viennent s’ajouter des préoccupations écologiques. 

Edition spéciale de la cafetière à piston Chambord de Bodum (armature et couvercle en inox, poignées bois). Disponible en 0,5 l et 1 l


Jura a lancé cette année Ono, sa première machine à café moulu. Semiautomatique, celle-ci est dotée d’une unité de percolation brevetée Jura. Et pour ceux qui apprécient la fraîcheur du café tout juste moulu, la marque lance Pag, un moulin à café offrant 7 niveaux de broyage. Prix public : 349 € la machine Ono, 159 € le moulin Pag

« Les consommateurs boudent progressivement les capsules pour des questions écologiques et économiques. L’utilisation de l’aluminium, l’énergie nécessaire à sa transformation... À cela s’ajoute l’opacité des capsules. Le café à l’intérieur est déjà broyé, transformé. Et ces acteurs sont tellement énormes qu’on a du mal à savoir ce qui se trouve réellement à l’intérieur. Si Malongo ne met que du café dans ses pods, pour les autres, c’est plus incertain. L’avantage de l’espresso broyeur, c’est qu’aussitôt moulu, il est infusé. On restitue ainsi tous les arômes du café, mais aussi les huiles qui forment la fameuse crema présente au-dessus des espressos. 

Fabriquée en France, la machine à café à grains WMF Perfection propose 18 options de boissons préréglées auxquelles s’ajoutent des possibilités de personnalisation.

Il faut bien comprendre qu’une heure après avoir été broyé, la mouture du grain perd 50 % de ses arômes. C’est là tout l’intérêt des espresso broyeurs », explique Bruno Salamonde, dirigeant de Scott France. Les amateurs de café seraient également toujours plus désireux d’obtenir des résultats sur mesure qui correspondent à leurs préférences individuelles. « On constate que les fabricants innovent sur les recettes proposées par les machines full automatiques. Ils proposent désormais du café froid, plusieurs boissons à base de lait. Les innovations du moment sont vraiment tournées sur ce type de proposition », analyse Émilie Pin. 


La machine expresso Classic Evo, icône de la marque Gaggia en café expresso à la tasse, possède 3 types de filtre (1 filtre pressurisé pour l’extraction idéale de la crema, 1 filtre pour pods, 1 filtre standard. Groupe d’infusion et porte filtre inox qualité pro pour un résultat 100 % barista. Système de chauffe par chaudière (pas de thermobloc donc entartrage moindre). Distribution France : Little balance. Prix public : 449 €.

Un constat partagé par Thomas Spanu : « Le développement du lacté est réel. Il existe deux Europes en termes de café, celle du café noir à l’ouest (France, Espagne, Portugal, Italie) et celle du lacté à l’est (Allemagne, Pologne, Pays-Bas, Russie). En France, nous restons majoritairement adeptes du café noir, mais la part du lacté a grandi de 6 points en deux ans. Et sur le marché on voit de plus en plus de machines qui incorporent cette proposition de boissons lactées, avec des qualités de boissons lactées similaires à celles qu’on trouve dans un coffee shop. » C’est le cas de la machine WMF Perfection qui en plus de proposer des boissons lactées permet de les personnaliser et d’enregistrer les réglages idéaux. Un sens de l’innovation qu’on retrouve également chez Jura : « Sur nos machines, on peut même changer les températures du lait, du café, mais aussi l’intensité du café, souligne Anna Lagleize, responsable marketing et communication chez Jura. On peut également programmer jusqu’à 35 recettes différentes sur nos modèles les plus haut-de-gamme. »



Lot de 6 agitateurs à café chez Chevalier diffusion (inox finition miroir). Ce petit ustensile au design moderne permet d’obtenir une saveur et un arôme équilibré, et se révèle également utile pour mélanger les autres boissons chaudes. Prix public : 15 € les 6.


Look rétro et simplicité d’utilisation pour la cafetière filtre électrique KBG Select de Moccamaster.

Par ailleurs, bien que les machines à espresso broyeur puissent représenter un investissement initial plus élevé, à long terme, elles offrent un coût par tasse de café moins élevé par rapport aux capsules et dosettes. Les consommateurs peuvent économiser de l’argent en achetant du café en grain en vrac plutôt que des capsules individuelles. « Avec un espresso broyeur, le café revient à 12 centimes. Avec une capsule le prix grimpe à 40 centimes, voire davantage », témoigne Bruno Salamonde (Scott France). Enfin bon nombre des acteurs du secteur s’accordent à dire qu’un parallèle peut être fait entre le monde du café et celui de l’œnologie et que cela profite à ces machines sophistiquées. « On est sur un monde connexe à celui du vin. Les consommateurs se dirigent de plus en plus vers des torréfacteurs et l’offre du café en grain s’étend. 

Initialement conçue en noir, rouge, taupe et blanc, la machine à café avec broyeur intégré de Smeg adopte deux nouveaux coloris : le vert émeraude et le full noir mat. 


C’est un phénomène marqué et l’ascension de l’espresso broyeur témoigne de ces préoccupations », remarque Émilie Pin. Sur ce point encore, Thomas Spanu (WMF) la rejoint : « C’est tout un écosystème qui monte en puissance, avec les torréfacteurs, les baristas, la notation des grains, etc. Ça a toujours existé, mais le développement est fulgurant depuis les 3 ou 4 dernières années. » De plus, « les enjeux de sourcing sont de plus en plus présents, notamment auprès des torréfacteurs qui mettent en avant une démarche éthique et engagée pour rassurer le consommateur », souligne Julien Augusto, coordinateur Gaggia domestique France.


LE SLOW COFFEE N’A PAS DIT SON DERNIER MOT

En inox, la machine à café expresso Pro avec moulin intégré de Lacor est dotée d’un moulin conique avec une meule en acier inoxydable intégrée. Réservoir de café de 250 g avec possibilité de réglage entre 30 types de mouture ; puissance : 1550W ; pression : 20 bars. Bras porte-filtre à double sortie, pour préparer 1 ou 2 cafés simultanément. Prix public : 750 €.

Comme de nombreux univers, le monde du café peut être clivant. Les préférences et les opinions des amateurs de café peuvent varier considérablement, ce qui crée souvent des débats et des divergences d’opi - nions. Notamment en ce qui concerne les méthodes d’infusion. « Le marché des machines à espresso broyeur est plus gros en valeur étant donné leur prix, mais la quantité de cafetières filtre vendues demeure bien plus importante. La cafetière filtre perdure et ce n’est pas près de s’arrêter avec l’offre grandissante de cafés de spécialité », évalue Alexis Figini, brand manager pour De’Longhi. Marc Picard chez Bodum confirme : « Pour moi nous sommes toujours dans la troisième vague, celle du slow coffee au sens pour-over, c’est-à-dire associé au grain fraîchement moulu. Oui, on constate une très forte croissance du café en grain tout juste moulu. Mais c’est une petite portion du marché. C’est un peu la Rolls Royce. Mais est ce qu’on a vraiment besoin d’un espresso broyeur pour faire du bon café ? La réponse est non », affirme-t-il avant de poursuivre : « La tendance c’est le slow coffee allié au fait de moudre. Cela exalte les saveurs. Les méthodes d’infusions douces sont les seules qui vous permettent de véritablement découvrir les arômes d’un café. Il n’y a qu’avec l’alliage de ces deux méthodes que l’on peut comprendre le concept du café d’origine. » Pour Mathilde Bonnaud, gérante de Moccamaster By Calita, si le café filtre a longtemps eu mauvaise presse c’est uniquement parce que les consommateurs le laissaient chauffer sur plaque toute la journée. « Pour avoir une bonne extraction de café, la température de l’eau doit osciller entre 92° C et 96° C. Il doit par la suite être maintenu à la bonne température. Nos machines disposent d’un capteur de température sous la plaque maintenir le café à la température maximum de dégustation soit 85° C. » Si Mathilde Bonnaud établit elle aussi une similitude avec le vin, elle raisonne différemment : « Le café, c’est comme l’œnologie. Le sujet de la traçabilité est de plus en plus prégnant. Et pour déguster des grands crus de café, on a besoin de slow coffee. Avec nos machines électriques, on obtient quasiment la même extraction qu’avec une Chemex. Il faut bien comprendre qu’il y a davantage de caféine dans une tasse issue d’une filtration lente que dans un espresso. On sentira plus les arômes avec une filtration lente. Par ailleurs, le café filtre à un autre avantage, le filtre papier retient une grande partie du mauvais cholestérol. »

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