Pour attirer de nouveaux talents ou faire face aux nouveaux arrivants, de la conception aux choix de
Le choix de la matière utilisée en art de la table dépend des préférences esthétiques personnelles et des tendances du marché. Cependant, certains matériaux doivent leur popularité à leurs qualités mécaniques. Explications.
VERRE ET PORCELAINE, ÉLÉGANCE ET RÉSISTANCE
Il suffit d’identifier les matières prédominantes dans les services qui équipent les hôtels et les restaurants pour déterminer celles qui, en plus d’être appréciées pour leurs styles, répondent aux besoins d’une cuisine quotidienne pour des raisons mécaniques.
« La principale qualité du verre, ce qui rend la matière magique, c’est sa transparence ! » s’exclame Nicolas Bigot, directeur commercial de La Rochère. Ce n’est peut-être pas un hasard si élégance rime avec transparence. Quelle que soit la couleur, la forme, la texture de l’aliment, le verre a cet atout majeur de le mettre en valeur. Mais la transparence n’est pas la seule caractéristique qui fait du verre un indispensable de l’art de la table. « Le verre trempé est extrêmement résistant aux chocs. Le restaurateur peut utiliser de manière intensive le verre sans s’inquiéter du niveau de casse. La durabilité dans l’appréciation de la matière est un critère dont l’importance ne cesse de croître. L’aspect sanitaire également et sur ce point, le verre en tant que matériau inerte a de vrais atouts face au plastique dont la porosité et la migration des particules à la chaleur inquiètent », affirme Gwenaëlle L’Hénoret, directrice marketing Europe d’Arc international. Malgré les avancées technologiques, techniques et industrielles, la porcelaine fait, elle aussi, partie de ces matières qui ont su traverser les années et temps par leur beauté et leur technicité.
Si celleci est appréciée, c’est en raison de sa finesse qui n’a d’égal que sa résistance. En plus d’être particulièrement résiliente aux chocs, nombre de porcelainiers qualifient cet “or blanc” particulièrement endurant face aux taches. « La céramique permet de travailler la finesse et offre des possibilités de forme et de design infinies. C’est ce qui passionne les designers avec lesquels Revol travaille à l’instar de Ferréol Babin qui a donné naissance à la collection YLI. Initialement, ce designer travaille le bois, explique Paul-Ambroise Saunier (Revol) avant de poursuivre : La quantité de kaolin dans sa composition crée un maillage ultrarésistant mécaniquement. Par ailleurs, sa cuisson à 1 320°C rend sa porosité nulle. Chez Revol, elle est de 0,01 %. Rien n’y pénètre ce qui garantit une hygiène et une résistance optimales. Utile pour la plonge !
Quand ça casse, ça ne s’ébrèche pas, ça casse complètement. La densité de la porcelaine permet en outre de bien maintenir la chaleur. Après le passage au passe-plat, le serveur peut ramener les assiettes sur la table à bonne température. Elle remplit les conditions techniques nécessaires à la cuisine au quotidien. Les acteurs de la restauration peuvent adorer un design, mais si le matériau est fragile ça sera rebutant. » Les contenants en bois et en mélamine, eux aussi, suscitent l’intérêt de ceux qui optent pour la durabilité.
Si pour des questions
d’hygiène, le bois est incompatible avec l’hôtellerie-restauration, les
particuliers eux, sont chaque jour plus nombreux à se tourner vers ces
objets écoresponsables. « Du côté de l’hôtellerie- restauration, la mélamine fait partie des matériaux permettant de remplacer les contenants
jetables et s’impose également aux particuliers qui se tournent vers des
objets écoresponsables et réutilisables, observe Christophe Decanter,
directeur commercial chez Lacor. Elle est parfaite pour une utilisation
nomade et outdoor, sans risque de casse tout en étant facile à laver.
Elle n’est pas adaptée pour la chaleur en revanche. »
LE GRÈS, ROI DE LA CONSERVATION
Si Corinne Jourdain Gros reconnaît volontiers le caractère “premium” de la porcelaine, elle tient à rappeler que la matière n’a ni le monopole de la robustesse, ni celui de la noblesse. Pour la présidente de la Manufacture de Digoin 1875, le grès – la plus rustique des céramiques – propose des dressages tout aussi chic.
« En céramique, il existe quatre types de pâtes : la porcelaine, le grès, la faïence et la poterie. Elles fonctionnent deux par deux. Le grès et la porcelaine ne sont pas poreuses, en raison de leur haute température de cuisson. 1 300°C pour la porcelaine et 1 200°C pour le grès. La faïence et la poterie sont, quant à elles, cuites à des températures plus faibles, ce qui vaut aux objets conçus dans ces matières d’être plus perméables et fragiles. C’est facilement vérifiable dans un vide-grenier. Les assiettes en faïence s’ébrèchent à force d’usage.
La faïence est aussi l’unique victime du tressaillage (des microrayures, NDLR) qui se forme à la surface des assiettes avec le temps et résulte du frottement des lames des couteaux. Ce phénomène n’existe pas sur les assiettes en grès ou en porcelaine puisque ce sont des pâtes fermées toujours en raison de la température de cuisson. L’imperméabilité du grès, en fait une matière idéale pour la conservation et mécaniquement très résistante à tel point qu’au XVIIIe et XIXe siècles, on trouvait des canalisations en grès.
Ce dernier est par ailleurs fréquemment utilisé pour les contenants dans l’industrie chimique, pour la simple et bonne raison que c’est une matière opaque. D’ailleurs, pour ne pas voir leurs qualités nutritionnelles et gustatives altérées par la lumière, certains condiments tels que l’huile d’olive ou le vinaigre devraient être conditionnés dans des contenants en grès plutôt qu’en verre. »
LA POROSITÉ, FORCE ET FAIBLESSE DE LA FAÏENCE
Si dans la famille des céramiques, la faïence demeure la plus fragile,
sa plus belle victoire s’établit dans sa capacité à avoir transformé sa
faiblesse en une véritable force comme l’explique Aurélie Richard, directrice artistique de la Faïencerie de Charolles : « Sa fragilité vient de
sa porosité, mais celle-ci est également une qualité. C’est la matière la
plus belle à décorer. Elle conserve très bien les couleurs qui peuvent être
déclinées en mat et en brillant. C’est chatoyant, il y a une profondeur.
En termes de forme, sa “matérialité” permet d’avoir des finitions quasi
parfaites. » Un constat partagé Marc Bureau, directeur de la faïencerie
de Gien : « Si le décor de nos pièces est inaltérable c’est parce qu’il est
réalisé sur des pièces déjà émaillées. La pièce va
être de nouveau cuite après sa décoration.
L’émail va fondre et le décor va être enverré dans la matière. Une fois sec, ça
ne bouge plus. Prenez une pièce en
faïence, passez-la régulièrement au
lave-vaisselle, vous constaterez que
le décor sur une assiette en faïence
ne s’estompera jamais et les couleurs resteront chatoyantes comme
au premier jour. »