Cuisson : régler le merchandising pour guider l'expérience client

20 juin 2023

Outil clé pour développer les ventes et se distinguer de la concurrence, le merchandising est un précieux allié lorsqu’il s’agit de relayer la technicité des ustensiles de cuisson, à condition d’élaborer une stratégie cohérente qui aide le client à se projeter

L’ un des principaux enjeux du magasin est de rentabiliser l’espace de vente. Une stratégie gagnante pour atteindre cet objectif est l’optimisation du merchandising : celui-ci stimule en effet les ventes, attire l’attention des chalands grâce à son impact visuel, anime l’offre en rayon et favorise l’achat d’impulsion. 

Le magasin Casseroles & Co (Haute-Savoie) a fait le choix d’un classement par marques et d’une tête de gondole avec l’Incroyable cocotte de Cookut qui est un de ses best sellers, en particulier grâce à un merchandising étudié sur les possibilités de personnalisation.

Les magasins doivent aujourd’hui forcer le trait en matière d’inventivité au regard de l’e-commerce qui met en avant des articles avec pas ou peu de mise en scène et une communication orientée informations techniques et prix. La particularité du merchandising lorsqu’il est question d’ustensiles de cuisson réside dans deux principaux critères. « Ce sont des produits très techniques et nous nous apercevons que les clients sont encore nombreux à ne pas savoir comment saisir, cuisiner dans l’inox ou encore mijoter… La cuisson est un champ complexe, le merchandising est donc un outil qui aide à identifier le bon ustensile pour le bon usage », résume Philippe Gelb, directeur général de Beka France. Pour y remédier, Beka développe par exemple des leaflets A5 à destination du consommateur pour l’accompagner dans ses premiers pas dans l’utilisation. Autre outil qui se révèle un bon allié pédagogique : le QR code, avec lequel les consommateurs sont largement familiarisés depuis la pandémie de covid-19. « La catégorie cuisson est hyper technique, il importe donc d’avoir un ou des supports pour bien vendre et bien utiliser le produit, en plus de fournir une présentation attractive », renchérit Valérie Bignon, dirigeante du magasin Casseroles & Co à Saint-Julien-en-Genevois (Haute-Savoie).

Kela a conçu des panneaux rétroéclairés interchangeables pour ses têtes de gondoles qui peuvent être remplacés par des cadres A4 ou A3 par les magasins disposants de peu de place pour mettre en avant une gamme ou une thématique. Un logo 3D est également disponible, avec ou sans aimant, ainsi qu’un guide d’utilisation des différents matériaux.

Second facteur de complexité, la mise en scène de ces ustensiles ne coule pas de source. « La présentation des produits dédiés à la cuisson en point de vente est statique et sortie du contexte de l’utilisation, souligne Nathalie Chabert, responsable marketing de Zwilling France. Même la céramique culinaire, malgré la belle palette de couleurs qu’elle arbore, n’échappe pas à cette règle : « Ce sont des produits plats qui se posent à l’horizontale sur la table : ce n’est donc pas l’idéal pour les présenter en magasin, relève Annabelle Geffroy, chef de produit cuisson chez Peugeot Saveurs. Nous avons donc conçu des présentoirs pour verticaliser nos plats pour qu’ils soient vus de loin, dans leur intégralité et de façon à mettre en avant leur empilabilité. » 

LE MEILLEUR VENDEUR DU MAGASIN ? 

Les marques du groupe Zwilling privilégient un merchandising allégé en PLV pour que le conseiller et le produit soient leurs premiers ambassadeurs. 

Lionel Debus, directeur général de l’enseigne TOC, est formel : un merchandising bien réglé est une clé de succès, susceptible d’accroître le chiffre d’affaires du magasin de 10 à 15 %. « C’est un des meilleurs vendeurs du magasin : présent en vitrine, en caisse et en rayon, il rapporte tout le temps et travaille de la première minute de l’ouverture du magasin à la dernière avant la fermeture, voire la nuit si la vitrine est éclairée, résume Lionel Debus. Mais attention : si le merchandising est un étai, une composante du processus de vente, ce sont la qualité du conseil et les compétences des vendeurs qui font la différence. » L’enseigne utilise une variété de techniques : mettre en avant les produits selon la saisonnalité, utiliser des casseroliers qui permettent une circulation fluide et de passer d’une proposition à l’autre, et surtout soigner les zones chaudes (au niveau des yeux du client) : « Les best of sont à placer à cet endroit et cela doit être réglé comme du papier à musique. Pourquoi ? Parce que cela a un impact direct sur le résultat du magasin », insiste Lionel Debus. Le merchandising est donc à bâtir sur la base des résultats réalisés par les produits, et non sur une habitude, un espace disponible, le fait d’apprécier tel ou tel article, ou parce que celui-ci est placé à tel endroit tous les ans.

LE PORTE-PAROLE DE LA TRAÇABILITÉ ET DE LA QUALITÉ 

Depuis 4 ans, Sitram mène une politique merchandising forte en grande distribution pour la mise en avant de ses ustensiles de cuisson fabriqué à base de matière première recyclée.

Certes c’est une lapalissade : les ustensiles de cuisson sont destinés à être en contact avec les aliments. Un paramètre qui a une incidence sur le merchandising à l’heure où les consommateurs sont de plus en plus attentifs aux conditions de production, aux matériaux utilisés et à leur santé, ainsi que l’explique Guy Gyselinck, directeur des ventes France pour The Cookware Company : « La qualité et la traçabilité à chaque étape de la production sont mises en avant, de la fabrication jusqu’au consommateur : labels, PLV indiquant les garanties, qualité des produits, etc. L’accent sur le merchandising est d’autant plus important que notre offre – les ustensiles revêtus en céramique sans PFAS, est spécifique et encore relativement méconnue en France. » Dans le segment des ustensiles de cuisson, le produit ne se suffit en effet pas à lui-même et le magasin ne dispose pas toujours d’une force de vente en nombre et formée. 

Cristel a imaginé des présentoirs à base de caisses en bois pour accorder le merchandising autour de son concept Biome aux notions de cuisine saine portée par le produit.

Le merchandising est donc le relais idéal pour renseigner le client. Cristel par exemple met un fort accent dans sa PLV sur sa fabrication en France, la garantie à vie de ses produits et son engagement environnemental : « C’est non seulement une façon d’animer le rayon, mais de proposer au client une lecture différente de l’offre », souligne Damien Dodane, directeur général délégué de Cristel. « Notre PLV valorise énormément le made in France, renchérit Annabelle Geffroy, (Peugeot Saveurs). C’est le facteur le plus important dans la mise en avant de notre gamme céramique et il justifie l’écart de prix avec les produits importés d’Asie. » Le merchandising a aussi son rôle lorsqu’il s’agit de démontrer le caractère premium d’un produit. « Nous constatons une augmentation significative du sell out dès lors que nos produits sont présentés sur table plutôt qu’en broche », fait valoir Claire Gaudin, chef de produits Lagostina (Groupe Seb). 


NE PAS RESTER STATIQUE

Travailler les associations de formes, de tailles et de couleurs avec un effet de massification, comme ici avec les plats en céramique Peugeot Saveurs, retient l’attention du client. La marque orne son packaging de visuels de recettes pour mettre davantage d’émotions dans la théâtralisation de ses plats, présentés comme des objets déco.

Un agencement bien réglé permet de renforcer l’adhésion à une marque, ou d’inciter le client à en tester une autre : chaque élément est donc à placer stratégiquement pour renforcer l’attrait du produit voire à en justifier le tarif. « Trouver le juste équilibre est un exercice de style, s’exclame Valérie Bignon (Casseroles & Co). Jouer sur la massification de l’offre sans que le magasin ait l’air encombré, ainsi que sur les espaces blancs... Les représentants des marques sont d’une aide précieuse pour trouver le bon compromis. Leur regard est vraiment pertinent d’autant qu’ils visitent une multitude de boutiques ! » Il n’est en effet pas nécessaire que chaque recoin du magasin soit rempli de produits : aménager des contrastes aide à valoriser certains ustensiles ou présentoirs, sans noyer le client sous un monceau d’objets, et à avoir un point focal qui guide le regard. 

The Cookware Company a confié au printemps la distribution de ses produits dans le réseau spécialisé à Bastide 1880. La stratégie merchandising du groupe, déployée depuis avril en France, intègre la mise à disposition des magasins d’un mobilier haut de gamme. Le fabricant investit également dans une campagne marketing pour sensibiliser le consommateur français à ses produits revêtus sans PFAS.

Astucieusement répartis dans l’espace, les tables et les displays permettent d’inciter le client à ralentir. Il importe pour cela que les thèmes de chacun d’eux soient cohérents et fassent l’objet de rotations pour maintenir l’intérêt des habitués. Et bien entendu, retravailler au moment opportun son agencement pour « faire remonter les produits de saison (les cocottes, les planchas, etc.) dans les zones chaudes », rappelle Lionel Debus (TOC). Un rafraichissement régulier des présentoirs permet de maintenir l’intérêt des clients. Au magasin et ses équipes de redoubler de créativité dans une catégorie où le nombre de marques est limité et la fréquence du renouvellement de l’offre produit modérée. Le design du magasin n’est dans ce contexte pas destiné à rester statique. Toutes les occasions sont propices à envisager le réagencement des présentoirs, de la disposition et de la signalétique. Sans oublier de jouer sur la variété des formes qui attire l’œil. « Nous changeons nos vitrines toutes les 2 semaines, témoigne pour sa part Valérie Bignon (Casseroles & Co). J’ai remarqué que cela fonctionne parfois avec un effet retard : les chalands ne s’arrêtent pas tout de suite en voyant le produit mais reviennent ultérieurement à la recherche de ce qu’ils ont repéré : l’ustensile a donc bien été vu et il a marqué le client. » Pour cela, il est aussi intéressant de privilégier des solutions modulables pour les ajuster au fil du temps. Cela va sans dire, l’hygiène est également un aspect essentiel du merchandising qui garantit un environnement accueillant et attrayant pour les consommateurs, au même titre qu’un réglage approprié de l’éclairage d’autant que les ustensiles de cuisson, en inox en particulier, sont d’aspect relativement froid.

-

MERCHANDISING ET IMPACT ENVIRONNEMENTAL

Si une visualisation claire des produits et de leurs atouts fait l’unanimité, il en va de même pour l’écoresponsabilité. Avec de nouveaux défis en matière de merchandising et de son corollaire le packaging. Nombreuses sont les marques à réduire voire supprimer le plastique pour privilégier les matériaux plus respectueux. « Ce sujet est devenu ultra-sensible, important pour le consommateur car il le rassure sur son choix », fait valoir Damien Dodane, directeur général délégué de Cristel. Le fabricant de Fesches-le-Châtel a par exemple imaginé pour Biome une présentation à base de caisse en bois permettant à la fois de jouer sur les volumes et un effet authentique et naturel, assorti d’un dosseret pour montrer les trois cuissons possibles du produit et son livre de recettes. « Nous travaillons aujourd’hui à remplacer par un fourreau en carton le disque plastifié que nous apposions sur nos poêles antiadhérentes, poursuit Damien Dodane. Il est impératif d’être cohérent tout au long de la démarche et les consommateurs y sont aujourd’hui très attentifs. » La marque Sitram (Gers équipement) qui fête cette année ses 60 ans, mène quant à elle une politique merchandising forte pour promouvoir la bascule de la matière première primaire vers celle recyclée. Partant du constat que la fonte, l’inox et l’aluminium des ustensiles de cuisson sont recyclables à vie mais que les consommateurs ne savent pas toujours que faire de leurs ustensiles usés, Sitram développe depuis 2019 des opérations de collecte de poêles et casseroles en grande distribution contre remise sur l’achat d’un ustensile Sitram. Des opérations principalement relayées sur place par de la PLV, des kakémonos et des frontons, et couplée avec une politique packaging en carton labellisé FSC. « Quatre ans après la mise en place de cette opération, plus de 50 % de nos ustensiles sont issus de matières recyclées », se réjouit Philippe Bégué, président de Sitram. 

-

AMÉLIORER L’EXPÉRIENCE D’ACHAT VIA LA SCÉNOGRAPHIE

Dans son approche merchandising, Lagostina opte pour une présentation des ustensiles à la verticale et enrichit l’assortiment d’un socle spécifique pour la gamme Salvaspazio+ pour permettre au client de tester les poignées amovibles.

Créer une ambiance renforce l’adhésion à la marque ou incite les clients à en changer. Chaque élément est donc à placer stratégiquement pour renforcer l’attrait du produit. « Dans nos magasins, nous essayons de donner vie aux ustensiles de cuisson et de transposer le consommateur chez lui avec nos produits, explique Nathalie Chabert (Zwilling France). En 2005, à l’ouverture à Paris du premier concept shop Zwilling au monde, un tiers de la surface a été dédié à une cuisine ouverte pour sortir les casseroles des étagères et les mettre en scène dans un univers “comme à la maison” pour se les approprier : un principe qui nous guide toujours dans les ouvertures de nos boutiques. » Celui-ci a également présidé à l’agencement de la 4e boutique française de Zwilling qui vient d’ouvrir au centre McArthurGlen de Giverny (Eure), à laquelle la marque a ajouté des touches normandes dans un souci d’ancrage régional. « Dès que la mise en avant et la visibilité de la marque sont théâtralisées, cela porte ses fruits, remarque Philippe Gelb (Beka). C’est un levier de différenciation par rapport à internet et la concurrence, et permet à l’équipe de vente d’apporter sa touche personnelle. Dans tous les cas, ce doit toujours être du cousu main ! » Autre technique efficace et qui nourrit la théâtralisation, celle du cross merchandising qui consiste à regrouper les produits fréquemment utilisés ensemble pour développer les ventes additionnelles. Autrement dit, créer un contexte dans lequel les clients se projettent leur permet de s’approprier l’ustensile. Lagostina, pour stimuler la prise en main, a par exemple créé un socle spécifique pour sa gamme amovible Salvaspazio pour inviter le shopper à essayer le principe de la poignée, constater l’empilabilité des ustensiles. « C’est bien plus valorisant pour la gamme et le point de vente, constate Claire Gaudin (Lagostina). Nous ajoutons trois flyers de recettes – une entrée, un plat, un dessert – que le client peut emmener. Nous les adaptons aussi à la diminution de la consommation de viande et montrons la polyvalence de l’inox. » Enfin, si chaque magasin et chaque marque ont leur propre dynamique, l’objectif reste le même : offrir une expérience shopping attrayante et incitative pour le client.

Partager ce contenu